Test de Her story (PC)

Toute une histoire

Bonjour (bonsoir) à tous!

Après Oxenfree, on continue de parler de jeux un peu (voire très) atypiques, et sans forcément grande couverture médiatique. Cependant, il reste tout de même fort possible que vous ayez entendu parler de celui que l'on va aborder aujourd'hui. Que ce soit le cas ou non, j'espère que ce test vous plaira! C'est donc parti pour Her story!

La première chose à signaler concernant Her story est qu'il ne s'agit pas vraiment d'un jeu vidéo à proprement parler. Si vous cherchez du gameplay, des graphismes incroyables et une bande-son décoiffante, passez votre chemin, ce n'est pas ce que propose le soft, créé par une seule personne, Sam Barlow (s'étant occupé de Silent Hill:Shattered Memories notamment), et financé en partie par des "backers". Vous l'avez compris, il n'est pas du tout un gros projet, ce qui se voit très vite. Et il n'est pas non plus un jeu vidéo ordinaire. Comme son nom l'indique, ce qui compte est l'histoire, et uniquement elle. Peut-être est-ce la raison qui m'a fait apprécier l'expérience, car il s'agit bien de cela: une expérience. Appréciant les jeux narratifs, comme vous le savez désormais, Her story m'a parlé, car il n'a qu'un seul axe: la narration, justement.

La sobriété de l'ensemble peut surprendre d'ailleurs au premier abord. Après le menu, où une petite et sympathique musique d'ambiance se lance, on se trouve sans transition dans le "jeu", à l'interface presque terne. Normal, il s'agit d'un écran d'ordinateur affichant une base de données. Et l'essentiel du "gameplay" réside ici. Faire une recherche en procédant par un mot, ou des associations de mots, dans cette base de données utilisée par la police. C'est simple, oui, et c'est diablement efficace, d'autant plus que l'on ne cherchera pas forcément les mêmes termes que les autres joueurs, ou pas dans le même ordre. C'est là l'une des forces de Her story : il nous pousse à aller plus loin, à approfondir ce que l'on croit savoir, en multipliant les recherches, affichant les vidéos d'une seule et unique personne.

L'interface du jeu

Car on ne va évidemment pas à la pêche au hasard. Le but du jeu est de reconstituer l'histoire d'une jeune femme, ayant perdu son mari ( ce n'est pas un spoil, on apprend cela dès le début). Et les vidéos que l'on trouve par nos recherches ont été enregistrées dans les locaux du commissariat où cette femme a été entendue. C'est évidemment l'occasion de voir l'évolution de ces entretiens, et d'en apprendre plus sur ce qu'il s'est passé. Comme l'on joue tous de façon différente, et que nous ne faisons pas les mêmes associations, l'expérience s'en trouve sensiblement changée d'un joueur à l'autre. Car tout l'intérêt du jeu est bien sûr de nous faire reconstituer le puzzle en associant les pièces, et il est certain qu'une théorie établie en début de jeu aura changé quelques heures plus tard.

Her story possède un côté assez addictif, qui fait que l'on ne s'arrête pas au bout d'une heure et demie de jeu, même si ce dernier peut se terminer très vite, selon notre façon de jouer. On a envie d'en savoir plus, d'être le plus certain possible de notre théorie, et que ce que l'on prend pour acquis représente bel et bien des faits. Encore une fois, Her story est une expérience très personnelle, dépendant de la volonté du joueur à comprendre, et à trouver les entrées nécessaires à cette compréhension. D'ailleurs, si, dans tous les cas, le soft n'est pas très long, il peut occuper quelques heures, voire même une dizaine, si l'on décide de débloquer chaque succès, notamment toutes les vidéos, pratiquement au nombre de deux-cents. On a envie d'y revenir, afin de saisir toutes les subtilités de l'histoire, et d'avoir toutes les cartes en main pour la reconstituer.

Voici l'héroïne, via laquelle l'on essaye de reconstituer l'histoire

Le génie du jeu est le fait, non de se centrer sur une enquête policière, mais d'offrir la subjectivité la plus pure, car les seules réponses que l'on obtient proviennent d'une seule et unique personne, dont on ne connaît pas exactement le taux de culpabilité et d'innocence. Aussi, à certains moments, n'est-on pas certain de la véracité de ce qu'elle nous dit. C'est donc évidemment au joueur de séparer le vrai du faux, ou du moins, d'essayer de le faire. On se retrouve donc à se "battre" non pas contre le jeu, ou contre un boss, mais contre soi-même, afin de ne pas rester sur une théorie qui nous plaît bien, mais qui n'est pas tout à fait cohérente. Her story invite à une certaine remise en question au fur et à mesure de la progression. Bien sûr, tout ceci dépend du degré d'investissement du joueur, ce qui est une qualité en soi. Dans une certaine mesure, le jeu s'adapte à ce que vous faites, et vous laisse faire les connexions et établir une hypothèse, qui, faute de certitudes, ne demeurera pas plus que cela. Ce pourrait être frustrant, toutefois est-ce le postulat même du jeu. On l'accepte ou pas.

Il est difficile ici de parler de réalisation. En revanche, on peut aborder, pour finir, certains points plus ou moins en rapport. Si l'on ne peut évoquer une direction artistique, ou une technique, puisque, comme dit plus haut, on fait face à une base de données sur un écran d'ordinateur, on note quelques détails, notamment un jeu dans le jeu (amenant à un trophée relativement difficile à avoir), ou des traces sur l'écran pour faire plus "authentique". Ce sont des détails, mais qui plongent dans l'atmosphère. Et s'il n'y a aucune musique (hormis dans le menu), on note en revanche quelques bruits d'ambiance, comme une sirène de police, ou celui d'un néon défaillant. De même, on a droit au son des touches du clavier lorsque l'on fait une recherche. Sympa, donc. Pour finir, un mot sur le jeu de l'actrice, Viva Seifert, qui semble avoir divisé la presse et les joueurs. Pour ma part, je l'ai trouvée globalement convaincante, mais l'exercice de jouer seule étant périlleux, il y a des moments où on la sent à la limite, du surjeu notamment, des instants où elle ne semble pas tout à fait juste. Cependant, rien de rédhibitoire à mon sens.

Mon avis: Her story est un jeu à classer définitivement dans les expériences à part, tirant plus vers le film interactif que le jeu vidéo à proprement parler. Si l'on est allergique à ce genre de propositions, il sera difficile d'apprécier le soft. Pourtant, son jeu d'enquête, son caractère addictif, sa subjectivité totale, rendent au minimum curieux. Il ne laisse pas insensible, et sa nature à part, est suffisante en soi pour se laisser porter durant quelques heures dans la vie de cette femme bien loin des personnages communs du jeu vidéo. Comme toujours, soyez curieux, ça peut avoir du bon!

Testé par Traynor

Jeu disponible sur PC, OS X et iOS.

PS: Je n'ai pas fait de tableau récapitulatif avec gameplay, bande-son, etc..., ni donné de note, pour des raisons évidentes.