Test de Oxenfree (PC)

Lost, les disparus

Bonjour (bonsoir) à tous!

Petit détour par le jeu vidéo aujourd'hui, et pas pour évoquer un triple A, car ces derniers ne sont pas les seuls à pouvoir se montrer intéressants. Même si l'on est revenu de l'état d'émerveillement un peu stupide autour du jeu vidéo indépendant, certains s'étant visiblement rendu compte qu'un "petit" jeu pouvait aussi être mauvais, et avoir une politique douteuse (surfer sur la nostalgie par exemple...), quelques-uns parviennent à tirer leur épingle du jeu. C'est le cas de celui que l'on va aborder aujourd'hui. C'est parti pour Oxenfree.

La plage, premier lieu important du jeu

L'histoire commence par l'arrivée d'un groupe d'adolescents, dont le personnage principal que vous incarnez, Alex, sur une île située on ne sait pas bien où, île sur laquelle ne semble pas se dérouler grand-chose. Cette dernière est devenue un endroit touristique relativement fréquenté, mais au moment où les protagonistes s'y rendent, c'est la nuit, et l'on a déjà l'impression de se situer hors du temps et de l'espace. Et Dieu sait qu'il ne s'agit que du début. C'est l'occasion de découvrir un peu mieux les personnages, qui ont chacun leur personnalité, et leurs relations les uns par rapport aux autres. Il ne faut pas longtemps pour constater qu'ils sont nettement moins clichés que ce que l'on aurait pu craindre. Si un jeu comme Life is strange prenait le parti d'établir un monde assez stéréotypé dans son premier épisode pour progressivement s'en éloigner, Oxenfree fait preuve très vite d'une finesse certaine dans son écriture.

Ceci sera l'une de ses forces tout au long de l'aventure. Le jeu ne considère jamais le joueur comme un abruti, et ne le prend également que peu par la main. Ainsi, n'a-t-on pas l'impression d'être gavé d'informations plus ou moins utiles, aucun moment n'est trop appuyé, et ce que l'on a déjà compris n'est pas répété. Certains jeux et films pourraient en prendre de la graine, car c'est en prenant les gens pour des cons qu'ils le deviennent. Oxenfree joue la carte de la découverte. On explore l'île, on découvre ainsi le background de l'histoire, et l'on en reconstitue les morceaux. Toute proportion gardée, on n'est pas très éloigné du schéma d'un Dark Souls, ou d'un Bloodborne, c'est à dire que le jeu ne nous balance pas toute l'histoire au visage, et va préférer que l'on remplisse les trous de l'intrigue. Bien sûr, au final, Oxenfree demeure plus clair que les jeux cités précédemment, néanmoins, il laisse pas mal de place à l'interprétation.

Alex, protagoniste principal de l'histoire et catalyseur de votre façon de jouer

Le plaisir de parcourir l'île et ses secrets demeure donc intact tout au long de l'aventure, qui peut durer environ cinq heures en allant plutôt à l'essentiel, et au moins le double si l'on veut tout fouiller de fond en comble. De plus, la rejouabilité est bien présente, puisqu'il existe plusieurs fins possibles, selon les dialogues, et les relations que vous avez entretenues avec les autres personnages. Vous pouvez parfaitement décider de faire d'Alex une petite (ou grande) peste, le jeu ne vous signifiera jamais que ce n'est pas la voie à emprunter. Même si Oxenfree est doté d'un scénario, on le parcourt comme on le souhaite. Le revers, si l'on n'apprécie pas cela évidemment, est que l'on est amené à faire un certain nombre d'allers-retours entre les différentes parties de l'île. On reste loin d'un Metroid Prime par exemple, mais il faut être averti avant de se lancer dans le jeu. Ceci dit, le plaisir procuré par Oxenfree est tel que l'on oublie vite ce côté un peu fastidieux.

Car, outre le plaisir de la découverte, le jeu établit une ambiance incroyable, qui ne laisse absolument pas insensible. L'aura de mystères entourant l'île est presque palpable, et l'on passe très facilement d'un état d'apaisement à un petit stress selon les nombreuses situations, et au fur et à mesure que le fantastique se dévoile. Car Oxenfree n'est pas juste une histoire d'ados, c'est aussi une histoire de "fantômes". Là encore, on aurait pu craindre un manque de finesse dans l'écriture, plaçant ce fantastique hors-sujet, ou peu pertinent, il n'en est rien. Oxenfree maîtrise ses sujets et les brasse en un tout ultra-cohérent, inspiré d'une véritable histoire. Inutile d'en dire plus, le soft doit être une expérience personnelle. Ce qu'il y a à retenir est que l'on se retrouve très vite happé par l'histoire, et par ce monde à part, maîtrisé, que beaucoup de jeux peuvent lui envier, ainsi que par la maturité des traitements de ses thèmes. Dire qu'il s'agit du premier soft de Night School Studios... Autant dire que ça promet pour la suite.

Oui, Oxenfree a une identité visuelle très marquée

Cette ambiance est d'autant plus marquante que le travail sur le son et les environnements est incroyable. Visuellement, Oxenfree n'est pas un foudre de guerre technique, c'est certain. Néanmoins, il demeure très propre, et la direction artistique envoie du lourd. Il est doté d'un véritable cachet, en faisant un ravissement pour les yeux. Et ce choix s'avère en plus justifié, et pas seulement là pour faire "arty". Beaucoup de développeurs semblent croire qu'il suffit d'opter pour une direction artistique un peu atypique pour avoir un jeu intéressant, mais cette dernière se doit d'être justifiée, ce qui est rarement le cas. L'esthétique de Oxenfree est très cohérente avec ses personnages et son histoire, s'approchant presque du sans-faute. Dans ce domaine, Night School Studios fait preuve d'une maturité étonnante et appréciable. Et que dire de la partie sonore? On frôle encore une fois la perfection. Que ce soit les bruitages, les doublages, ou l'utilisation des musiques, tout accompagne parfaitement les personnages et leur évolution dans l'histoire, sans jamais être invasifs, en étant toujours justes. Le jeu sur les sonorités se fait en grande partie via la radio que possède Alex, rendant le tout toujours plus cohérent.

Cette radio est d'ailleurs un élément de gameplay important du jeu, puisqu'elle permet d'avancer dans l'histoire, d'en découvrir plus sur le monde, et d'entrer en contact avec un certain nombre de protagonistes, accueillants et moins accueillants... Ce que l'on peut entendre via la radio renforce l'ambiance du titre, ainsi que le sentiment d'insécurité. S'ajoutent à cela quelques passages flirtant avec l'horreur, sans toutefois céder à une quelconque facilité, et évitant les écueils du genre. A la fois jeu d'aventure, d'exploration, de narration, de suspens, Oxenfree établit un gameplay simple et efficace, se prenant très facilement en main, et comportant ses petites subtilités, le jeu sur les fréquences offrant son lot de moments sympathiques. En parlant de subtilité, il est à noter que le jeu est uniquement en anglais, et peut donc perdre les allergiques à la langue de Shakespeare. Sans être d'un niveau extraordinaire, l'anglais de Oxenfree comporte ses finesses et peut être difficile sans le niveau adéquat. A la décharge du studio, il n'avait certainement pas les moyens de faire une traduction ou une localisation.

Les dialogues sont au centre de l'expérience de jeu

Scénario	Gameplay	Graphismes	DA	Bande-son	Durée de vie
16/20	15/20	14/20	19/20	19/20	15/20

Note générale: 16/20

Mon avis: On pourrait épiloguer pendant des heures sur Oxenfree, mais ce serait prendre le risque de spoiler un jeu qui n'est pas excessivement long, mais néanmoins riche, et de gâcher une expérience maîtrisée, addictive, cohérente de bout en bout, en un mot : unique. Oxenfree n'est pas seulement un petit jeu, il est une perle à ne pas rater, une excellente surprise de cette année.

Testé par Traynor

Jeu disponible sur PC, PS4 et Xbox One.